Les messages incessants dont vibrer le téléphone de Jun encore et encore. Il est tôt et n'importe quel membre du groupe pourrait se dire qu'il est disponible pour sortir ou simplement passer un moment ensemble, mais ce serait une erreur. Un simple coup d'œil sur le flux de message dans un groupe de conversation suffit pour lui confirmer que, même si son téléphone sonne sans arrêt, il n'y a rien de grave ou d'urgent. Il appuie sur le mode ne pas déranger qui lui assure tranquillité, sauf si une sélection très restreinte de ses contacts lui téléphone. Le lendemain, il a prévu de se lever tôt pour aller s'entraîner en danse. Sa salle est réservée de bonne heure et tout est déjà prêt. Désormais il ne lui manque plus que le nombre d'heures de sommeil nécessaires à une bonne performance. La nouvelle fonction enclenchée de son téléphone devrait le lui assurer. Et, en effet, une fois dans le calme et la pénombre, il sombre en quelques minutes à peine. Cela ne rend pas le réveil (trop) matinal moins difficile, mais il sait qu’il sera en forme une fois douché et préparé. Il est très tôt, car il a besoin de prendre son temps pour émerger et se lancer dans sa routine du matin. Ainsi, lorsqu’il quitte sa chambre pour se rende dans la salle d'entraînement, il a la bonne mine de quelqu’un de reposé.

Il s’est lancé dans quelques étirements lorsque son téléphone sonne, lui rappelant que ce dernier est toujours dans son mode ne pas déranger. L’accueil de l’agence fait partie des numéros qui ignorent la restriction, mais c’est étrange qu’on lui téléphone à cette heure où les locaux sont déserts. « Jeon Jiwoo est arrivée pour votre séance d'entraînement. » L’informe la réceptionniste. « Hm, merci ? » Bafouille le Seventeen. La salle est réservée à son nom, mais peut-être qu’un autre membre a décidé de venir s'entraîner avec une membre de KARD – il n’est pas au courant de tout ce que préparent les membres du groupe à longueur de temps. Il défile les différentes conversations qu’il a ignorées jusque-là, mais rien ne le mentionne. Il laisse ses affaires dans un coin et va faire le tour des environs, mais à part lui il n’y a pas âme qui vive. Confusion ? Erreur de planning ? Il pourra voir directement avec la concernée, se dit-il en revenant sur ses pas pour retrouver la salle d'entraînement. Mais l’opération se trouve être plus délicate que prévue, puisqu’il trouve la belle endormie sur une chaise. Jun comprend de moins en moins la situation, mais il est éduqué à ne pas réveiller une personne épuisée endormie. S’en suivent alors quelques allers-retours de sa part.

Un premier départ le fait se rendre dans la salle d’à côté, où ils entreposent du matériel et diverses fournitures. Il revient avec un plaid en main et toute la partie délicate de l’opération consiste alors à le déposer sur les épaules de l’endormie sans la réveiller. Puis il repart pour installer, petit à petit, un petit déjeuner sur la table. Comme il ne la connaît pas du tout, il installe un peu de tout : jus de fruit, viennoiseries, fruits, tartines et confitures… Avant de s’installer dans un coin avec son téléphone. A défaut de pouvoir s'entraîner (il ne veut pas faire de bruit) il étudie les vidéos de la chorégraphie qu’il voulait travailler. Il lève les yeux lorsque, plus tard, il voit du mouvement du côté de son invitée surprise. « Vous êtes réveillée ? » La question paraît bête, mais elle lui permet de notifier sa présence en douceur. Il se redresse et se dirige vers la table, à côté de laquelle se trouve également la machine à café. « Vous avez faim ? Je peux aussi vous proposer un café ou un chocolat…Cette machine fait aussi du thé, mais il n’est pas très bon. » L’’informe-t-elle. « Oh, je suis Jun ! » Se présente-t-il enfin, en se rendant compte qu’il ne l’avait pas fait plus tôt. « Je ne sais pas avec qui vous aviez rendez-vous, mais je crois qu’il y a eu une confusion sur le planning ? » Il a la naïveté de penser que le rendez-vous était tout sauf une excuse pour s’introduire ici.

Peut-être que Jun est allé trop vite. Peut-être qu’il aurait dû laisser quelques minutes à son invitée surprise pour émerger de son repos avant de commencer à s’adresser à elle - surtout en enchaînant ainsi les phrases et les questions avec un accent coréen qu’il ne maîtrise pas encore tout à fait. Cette histoire d'entraînement et de confusion de planning, le Seventeen y croyait sans même une once de soupçon. Les membres du groupe sont nombreux et travaillent beaucoup, cela n’aurait pas été surprenant (ni que l’un d’eux fasse une collaboration avec la maknae de KARD, ni qu’il soit trop occupé pour en avoir avisé tous les autres membres du groupe). Le grand naïf se retrouve donc confus de ces confessions, d’autant qu’elles semblent mettre mal à l’aise Jiwoo. Ses mains viennent s’agiter devant lui, comme pour essayer de chasser ce malaise qui s’installe chez la jeune femme. « Vous ne devriez pas vous excuser. » Assure-t-il. Et il le pense de tout son être. « Vous avez fait ça car vous vous inquiétez pour mon frère. Je comprends. » Tous les membres de Seventeen sont pour lui comme des frères. Jamais il ne pourrait blâmer quelqu'un qui prend soin de l'un d'eux et s’inquiète pour lui. « C'est très gentil de votre part d'avoir pris soin de lui hier soir ! » …Pendant que lui avait coupé les notifications pour dormir en paix. Peut-être qu’il ne va pas lui dire ça. Elle n'a d'ailleurs pas besoin de demander quoi que ce soit pour que le chinois attrape son téléphone et remise un message à l'attention du chanceux pour qui Jiwoo s'est déplacée jusqu'ici. Il envoie, réfléchit une seconde, recommence à taper rapidement sur son téléphone et envoie un second message avant de glisser le téléphone dans sa poche.

Pendant une seconde il a l'impression qu'elle va partir sans profiter de ce sublime petit déjeuner qu'il a mis en place pour elle. Mais son ventre la rappelle à la raison si fort que même Jun l'entend de là où il se retrouve. On ne peut lire sur son visage qu'un sourire attendri. « Un chocolat alors. » Il appuie sur le bouton de la machine et en profite pour s'en faire un également. Il installe les gobelets sur la table et tire même une chaise pour inviter la belle à s’y installer. C’est que sa maman a été très stricte sur la façon de traiter les femmes dans son éducation ! Pas étonnant que SeungGwan le considère comme la maman du groupe. « Ne dites pas ça ! Vous avez pris soin de Mingyu alors que vous êtes en plein come-back ! Vous devez sans doute être très occupée. Le moins que je puisse faire est de vous offrir le petit déjeuner pour que vous repreniez un peu de forces ! » Il est bien placé pour savoir le travail que représente un come-back. Et puis, il ne se risquerait pas de le faire remarquer à voix haute, mais Jiwoo ne lui semble pas avoir très bonne mine. Elle a les traits fatigués, et elle lui semble beaucoup trop mince. Oui, il sait que c’est nécessaire dans leur profession, mais là cela lui semble…trop ? S’ils étaient plus proches, il lui demanderait de ne pas mettre sa santé en danger pour sa carrière, mais il n’est pas très bien placé pour faire ça. « Servez-vous ! J’ai pris tout ça mais je vais être malade si je dois tout manger tout seul… » Sur la table, il y a déjà presque trop pour deux… Alors pour une seule personne, c’est impossible de tout avaler. « Si vous n’aimez pas, j’ai des confiseries chinoises dans mon sac … ? » Un seul mot de sa part et il ira les chercher !

Lorsqu’il la regarde, il voit et comprend sans mal les remords qui la rongent, alors qu’aux yeux du chinois, elle n’a rien fait de mal. Par ses actes et ses mots, c’est aussi ce qu’il essaye de lui faire comprendre. Elle a pris soin d’un membre de son groupe, d’une personne que Jun considère comme sa seconde famille. Elle n’a pas à rougir de cela. Lui aussi serait capable de contourner les règles avec un tel objectif. « Ça prouve que vous êtes une belle personne. » Tente-t-il de la convaincre (en vain ?). « S’inquiéter pour les autres, c’est très noble. Mais il ne faut pas faire passer les autres avant votre propre bien être. » Il le souligne car elle a vraiment l’air épuisée. Mais est-il seulement crédible ? Lui-même se mettrait de côté pour les autres. C’est dans sa nature, il prend soin des autres avant de penser à ce qui pourrait lui être bénéfique à lui. Sans doute que prendre soin des autres est une forme d’épanouissement, pour lui. Il en serait presque mal à l’aise de se retrouver un jour de l’autre côté du miroir, d’être celui dont on prend soin. Il aurait l’impression de recevoir plus d’attention qu’il ne le mérite.

Ce petit déjeuner à été installé pour elle. Mais, en réalité, il se rend compte que lui aussi, ça lui fait du bien, de mettre un peu l’entrainement de côté, pour une fois. Il faut dire qu’entre ses activités avec le groupe Seventeen et ses activités en tant qu’acteur, il ne prend pas souvent le temps de le faire. D’autant qu’il voyage beaucoup entre la Chine et la Corée. « Ça me fait plaisir. » Assure-t-il avec un sourire enfantin sur ses lèvres. L’évocation des friandises chinoises semblent la déstabiliser un moment. Jun ne peut retenir un petit rire gêné. Il passe doucement sa main dans ses cheveux. « C’est gentil, mais je sais que je dois encore travailler mon accent. » L’apprentissage du coréen était agréable et épanouissant, mais l’accent à toujours été très difficile pour lui. Aujourd’hui encore, il ne le maitrise pas encore et s'entraîne encore beaucoup. Pour répondre à sa curiosité, il se lève en direction de son sac. « J’en ai toujours beaucoup, car les autres membres aiment en manger, même s’ils diront le contraire ! » S’explique-t-il. Il déverse le contenu de son sac sur le bord de la table, un peu plus loin que tout ce qu’il avait préparé pendant le sommeil de la belle. « Si vous voulez goûter, vous pouvez prendre ce que vous voulez ! » En réalité, c’est toujours un plaisir de partager ce qui vient de son pays natal. Tout comme c’est agréable d’en parler. Il est donc très heureux qu’elle le mentionne. « Tous les jours, mais je suis en contact avec ma famille tous le temps. » Il attrape son téléphone (toujours pas de réponses de  Min Gyu ) et se rend directement dans sa galerie. Ce n’est pas difficile de trouver un selfie prit avec son petit frère, car il en a beaucoup. Il lui tend l’appareil pour qu’elle puisse regarder le cliché. « C’est mon petit frère. Je passe toujours beaucoup de temps avec lui quand je rentre. » Il pourrait parler de sa famille pendant des heures, mais il ne voudrait pas accaparer la conversation. Ce serait impoli. « Et vous, vous avez des frères et sœurs ? » Pour lui qui vient d’une famille si unie, il est difficile de s’imaginer une famille dans laquelle les relations entre les membres sont compliquées ; aussi il ne réalise pas que la question peut être particulièrement délicate.

Jun n’a que de la sincérité dans ses mots. Il regarde la maknae de KARD sans vraiment la connaître, et pourtant il a l’impression de la comprendre, tout comme il se sent compris dans ses yeux. Un sourire, doux, c’est tout ce qu’il est capable de lui offrir. Lui qui prend soin des autres, parfois trop lui dirait-on, devrait également se sentir concerné par les mots qu’il lui a adressés. Peut-être que la différence, c’est que l’on rend à Jun tout l’amour et toute l’attention qu’il offre aux autres. Il ne connaît pas le contre coup de trop donner aux autres, car il a le sentiment qu’on lui rend tout ce qu’il donne – et peut-être même encore plus. Il a de la douceur et de l’attention à offrir. Et Jiwoo, de son côté, semble en offrir bien trop et ne pas en recevoir assez. Est-ce qu’il se trompe en songeant à cela ? En toute sincérité, il préfèrerait se tromper. Mais en prenant soin d’elle ainsi, d’une façon aussi naturelle que simple (à ses yeux), il a l’impression que sa petite attention est accueillie comme une grande bienveillance par celle à qui elle est destinée. « Si je vous demandais de prendre un peu plus soin de vous, est-ce que vous le feriez ? » Demande-t-il en ne plaisantant qu’à moitié. Ils viennent de se rencontrer. A-t-il seulement le droit de lui faire la demande d’une telle faveur ? Le chinois considère presque qu’il mériterait de se faire envoyer sur les roses pour remettre les choses bien à leur place.

Il a comme chaud au cœur de voir Jiwoo manger avec appétit et reprendre quelques forces. Est-ce que c’est lui, ou est-ce qu’elle reprend des couleurs et commence déjà à avoir une meilleure mine ? Sans doute qu’une nouvelle sieste ne serait pas de trop après ce copieux petit déjeuner, mais non seulement il ne se permettrait pas d’en faire la remarque, mais en plus elle a très certainement autre chose à faire. Tous les membres de KARD doivent être très occupés en ce moment. Regard surpris, il ne réalise pas que ses joues prennent un peu de couleurs lorsque le compliment tombe au milieu de la conversation sans qu’il ne s’y attende – c’est l’effet du chocolat chaud, n’est-ce pas ? « Merci ? » Marmonne-t-il en passant une main dans ses cheveux. Il sait que son accent est en quelque sorte son point faible, même s’il a effectivement lu sur les réseaux sociaux que cela ne déplaisait pas nécessairement à ses fans. Heureusement pour lui, le sujet dérive rapidement sur les friandises que Jiwoo a accepté de goûter, quand bien même beaucoup de personnes refuseraient de manger des friandises dès le petit déjeuner. « Oui ! Vous aimez ? » Il semble aussi excité de partager des friandises de son pays qu’elle semble perplexe en les mangeant. Dans le fil de la conversation, il en vient à lui montrer une photo de son frère. Puis, il se demande s’il en fait trop. S’il ne l’ennuie pas en lui parlant de sa famille alors que c’est pour Mingyu qu’elle est ici. Pas pour lui. « Il est adorable. » Murmure-t-il en hochant la tête, prenant pour son jeune frère l’adjectif mignon tout en voulant laisser une porte de sortie sur cette conversation dans laquelle il est peut-être allé un peu trop loin. Il est trop à l’aise alors qu’il ne se connaissent que depuis quelques minutes.

Peut-être qu’il n’aurait pas dû l’interroger sur sa famille non plus. C’est ce qu’il se dit en voyant que le silence s’installe plus longuement que d’ordinaire lorsqu’on aborde ce sujet. Jun, il ne connaît que les familles heureuses. Il n’aurait jamais pu se douter que sa question était malaisante. « Je suis désolé d’avoir été indiscret. » La prochaine fois, il y réfléchirait à deux fois avant de poser une question indiscrète à une personne qu’il vient de rencontrer, qu’importe qu’il se sente si bien avec elle. « Vous voulez faire une photo avec moi à la place ? » Il tente la plaisanterie pour offrir un peu plus de légèreté à cette conversation trop sérieuse et morose. Jiwoo, de son côté, choisit une nouvelle confiserie qu’elle décide de partager avec lui. Elle le trempe dans son chocolat chaud, et bien qu’elle semble satisfaite du rendu, il décide de le manger de façon conventionnelle, sans tenter de faire des mélanges dont il doute du rendu. « C’est bon ? » Demande-t-il, curieux.