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Croisant les doigts devant lui, se redressant confortablement sur son siège, l'homme se munit de son plus beau sourire avant de gesticuler vers son interlocuteur pour débuter la discussion avec lui. Tout cela avant que les caméras ne commencent à filmer, bien sûr. C'est ainsi qu'il apprend les détails les plus croustillants, loin des yeux du publique.
______________________________________________________Mais la famille alors, est-ce que ça va?
Se mordre la lèvre. Ah non c’est vrai, il avait promis d’arrêter … surtout qu’il avait bin vue la maquilleuse soupirer en lui mettant du baume dans sa loge. Il devait arrêter de ce torturer ainsi.
«
Ma famille ? » ne pouvant réprimer une pointe d’angoisse, l’acteur enfonce profondément ses mains dans les poches cherchant à cacher une légère nervosité naissante.
«
Vous avez entendu parler de ma famille bien sûr … » le sourire un peu crisper devant la phrase pleine d’évidence. Sung Hoon essaye de se rappeler qu’il n’y a rien de mal à demander comment allait sa famille, bien que la situation soit compliquée.
«
Il ne faut pas croire toutes les rumeurs hein… je veux dire, parfois il y a du vrai et du faux, comme dans tout. Mais ils vont bien, ils mènent leurs vies, tout va bien. » Il a bien envie d’ajouter un ‘maintenant’ à sa phrase comme pour s’assurer que les temps difficiles étaient bien derrière eux, mais cela ajouterait de nouveaux soupçons.
Et puis, il y avait eu tant de choses dites sur sa famille, qu’il avait du parfois rappeler les faits réels. Certainement parce qu’il avait été découvert du grand public avec un certain type de personnages, les quelques recherches concises sur son passé avaient amené bien des rumeurs. Il viendrait d’une famille de Chaebol, comme ses personnages, et des personnes l’ayant encouragé à devenir l’artiste de la famille, entouré de médecins et d’avocats… pourtant la cruelle réalité était ailleurs. Sa famille avait souffert de la crise économique et des licenciements massives dans le service public du début des années 2000 comme beaucoup d’autres familles coréennes. Sung Hoon savait déjà qu’il n’aurait certainement pas d’autres choix que de couper les ponts pour vivre de sa passion sans être un poids, continuant le théâtre, cumulant les petits jobs, dormant dans les loges des théâtres ou dans la cabine du guichet après son service aux petits théâtres indépendants de Gangnam. Il lui avait fallut du temps pour ne plus être un être de l’ombre de ce milieu. Personne ne lui avait jamais dit d’arrêté, mais on ne l’avait pas encouragé non plus. Seule une personne l’avait véritablement sorti de la galère, et aujourd’hui elle n’était même plus à ses côtés. Sa famille aujourd’hui était bien plus aisé, les choses s’étaient arrangées oui, et lui avait reprit petit à petit sa place à leurs côtés, mais il savait aussi que sa soudaine popularité n’était pas toujours bien venue dans les milieux que côtoyaient les Park de son clan. Alors sa famille allait bien, et lui restait une sorte de vilain petit canard. C’était aussi bien ainsi après tout.
Comment se porte la vie amoureuse?
Les pensées de Sung Hoon étaient encore en train de naviguer, mais encore une fois il sembla surpris par la question, se trémoussant doucement en vérifiant que les boutons de sa veste étaient bien fermés. L’amour c’était tout un pan de sa vie, une sorte de sortie de secours qu’il avait toujours emprunté avec beaucoup de sérieux. Car on ne se moque pas de ce que l’on aime, que ce soit de sa passion ou de la passion que d’autres vous portent. Cette faculté à être plein et entier dans ce qu’il faisait, avait réussi à attirer des personnes formidables, une femme en particulier qui l’avait accueilli chez elle et dans son cœur et qu’il avait eu la chance d’aimer cinq longues années, avant que toute cette chance ne s’évapore comme neige au soleil car après tout, tout finit par passer et lasser et que l’amour n’est qu’un chemin que l’on prend à deux un temps avant d’aller plus loin, seul ou de nouveau accompagné. Sa popularité soudaine avait créé aussi une forme de peur de l’engagement, de peur de qui il pouvait devenir à présent… à croire que jouer toujours des salauds, ça a son effet sur sa personnalité, et le Park craignait bien de devenir comme eux, alors il se retenait bien souvent de tout, et surtout de s’adresser à celles qui semblaient lui sourire un peu plus à lui qu’aux autres.
«
Je suis trop timide pour ce genre de questions je crois. » répondit-il, sincère, un léger sourire se dessinant sur ses yeux. Franc et sincère, plus pudique qu’on ne peut le penser, surtout lorsque la corde sensible est touchée, la corde de ses sentiments et émotions.
«
J’ai toujours l’impression que l’on en sait plus sur moi que je n’en sais moi-même sur avec qui je suis ou je ne suis pas… surtout en ce moment. » ne pouvant se freiner dans une tentative d’humour, l’acteur laisse son si célèbre sourire en biais venir rendre ses yeux encore plus asymétrique un instant, une marque de fabrique qui semble plaire à la caméra et particulièrement aux productions Netflix depuis quelques années maintenant.
On entend souvent parler de votre carrière, mais comment se porte t-elle vraiment dites moi?
La légère tension qui s'est créée entre les sourcils de l'acteur se détend soudain. Il lui est tellement plus simple de parler de son métier que de sa vie privée, comme si sortir cette grande marionnette qu'était son rôle d'acteur dans une industrie presque trop saturée de figures plus charismatiques les unes que les autres étaient finalement bien plus simples que de parler de la simplicité de la vie.
Son parcours avait surpris et intrigué ; il aurait été bien mal placé pour dire que lui-même n'avait pas vécu dans la surprise de sa propre ascension, car rien ne l'avait prédit à finir autant sous les projecteurs.
«
Elle se porte bien mieux maintenant.» Ironise-t-il avec un sourire avant de pencher légèrement la tête sur le côté, son regard charmeur et asymétrique se plongeant dans celui du présentateur ?
«
Mais je ne regrette absolument rien, c'était difficile avant qu'on ne me laisse ma chance, mais j'aime toujours autant le théâtre, je pense...» Une douce pensée s'égare vers son passé d'auditions ratées, de soirées à livrer de la nourriture pour se payer quelques cours de théâtre et des photoshoot pour des book qui ne seraient jamais ouverts sur les tables des producteurs. Sung Hoon n'est pas assez beau, pas assez conforme, pas assez séducteur, sa carrure ne plaît pas, et finalement le théâtre lui a ouvert une petite porte dans laquelle il s'est engouffré.
«
Il faut dire que je n'en serais pas là sans le théâtre, même si c'est pour jouer les grands méchants, les cachets sont plus confortables.» le Park avait attendu longtemps et c'était presque inespéré que l'on vienne le chercher pour entrer dans une agence. Peut-être un instant avait-il cru qu'il serait celui que l'on apprécie et qu'on congratuler pour sa douceur et son romantisme. Quelques rôles par-ci par-là de personnages sympathiques, mais finalement, c'était bien de la faculté de faire naître la rage dans son regard et le méprit dans sa bouche qu'on le connaissait le mieux à présent. Beaucoup aimaient le détester, et les directions de castings semblaient être d'accord avec ce fait.
«
oh et ... Je peux le dire maintenant que ça a été annoncé... Je suis au casting de Squid Game saison 2 ! Donc j'espère que ça va continuer sur cette voie. » Sung Hoon se surprend à agrandir son sourire déjà large, comme si plus rien ne pouvait l'empêcher d'aller bien, car s'il a du travail, il est heureux, après tout, il n'a pas besoin de grand-chose d'autre.
Parfois, la célébrité c'est dure. On sait tous que ce n'est pas évident. Surtout lorsque les revues se permettent de critiquer nos choix
Sung Hoon acquiesce, la célébrité ça lui est un peu tombé dessus deux fois sans prévenir. On lui avait fait remarquer que ses choix devaient être les bons pour réussir ainsi à sortir du lot...
«
La première fois que j'ai eu des fans, je me souviens, on m'offrait des fleurs. Je signais des places de théâtre et l'encre du feutre bavait un peu, mais personne ne s'en souciait vraiment ...» un léger rire sort de sa bouche tandis que la technique autour des deux hommes commence à s'affoler. Le comédien connaît cette émulsion des dernières minutes, cet instant avant que tout ne bascule et que les masques ne soient mis pour devenir ce que le public attend de nous.
«
Aujourd'hui, mon agent me dit de ne pas signer tout et n'importe quoi, car ma signature pourrait se revendre...C'est fou non quand on y pense ?» Un rictus maladroit se dessine sur son visage qui fait bien son âge malgré tous les soins qu'il a pu y apporter. Les quelques années de galère à ne manger que du kimchi et de l'eau, se lisent sur les rides qui parcourent sa peau lorsqu'il sourit.
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Il y a peut-être perdu dans un tiroir quelque part, un autographe corné, je me dis que je dois tout à ces gens-là.» Un peu bousculé par les scripts qui viennent vérifier leurs micros et leurs positions avant le début de l'émission, Sung Hoon se laisse porter.
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Mais une chose est certaine, la célébrité, c'est juste un mot, la réalité, c'est que tout peut disparaître à tous moments non ? On entre sur scène et on en ressort après tout.» Il a bien envie d'ajouter qu'il en profitera tant sur ça durera, avant certainement de retourner sur les planches, finir sa houleuse carrière là où elle a commencé.. Mais Park Sung Hoon n'a pas le temps pour ça. Le spectacle doit continuer et il enfile le rôle de l'homme que l'on adore détester dans ses rôles, bien qu'il ne soit pas certain d'être toujours à l'aise avec cette étiquette, ça ne sera que pour un temps après tout ... Et on l'oubliera aussi rapidement qu'on l'a aimé.
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Il hoche la tête avant de faire signe à son invité de se diriger vers le plateau, pour débuter la vraie interview qui ne comportera pas toutes ces informations.